03.04.2020

Critères diagnostiques du trouble dépressif majeur selon le DSM-5 (code F34)

La traduction française officielle du DSM-5 est "trouble dépressif caractérisé". Nous avons préféré conserver l'ancienne traduction plus proche de ce que signifie "major" en anglais : important, significatif. cf. "Changements par rapport au DSM-IVR" pour plus d'explications. D'autre part les particularités acceptées pour les modifications admises pour les enfants et les adolescents sont décrites ailleurs.

A.  Les symptômes 1 et/ou 2 sont obligatoires et il faut réunir 5 critères ou plus pendant une durée ≥2 semaines.
Un symptôme ne peut être retenu que s'il représente un changement par rapport à l'état antérieur et s'il ne peut être imputé à une autre affection médicale.

  1. Humeur dépressive présente quasiment toute la journée, presque tous les jours, rapportée de façon subjective (p. ex. sentiment de tristesse, de vide, de désespoir), ou par les observations de l'entourage (p. ex. comportement larmoyant).
  2. Réduction marquée de l'intérêt ou du plaisir dans toutes, ou presque toutes les activités quasiment toute la journée, presque tous les jours (rapports subjectifs ou observations).
  3. Perte de poids significative en l'absence de régime, ou gain de poids significatif (p. ex. variation ≥5% de la masse corporelle en ≤1 mois), ou réduction ou augmentation de l'appétit presque tous les jours.
  4. Insomnie ou hypersomnie presque tous les jours.
  5. Agitation ou ralentissement psychomoteur presque tous les jours (objectivable par l'entourage, pas simple ressenti subjectif d'impatience ou de ralentissement).
  6. Fatigue ou manque d'énergie quasi quotidien.
  7. Sentiment d'indignité, ou de culpabilité excessive ou inappropriée (qui peut être délirant), presque tous les jours (pas simplement se faire le reproche ou se sentir coupable d'être malade).
  8. Réduction des capacités réflexives ou de concentration, ou indécision quasi quotidiennes (rapports subjectifs ou observations).
  9. Pensées récurrentes autour de la mort (pas une simple peur de mourir), idéation suicidaire récurrentes sans ou avec élaboration d'un plan ou tentative de suicide.

B. La symptomatologie est responsable d'une détresse cliniquement significative ou une détérioration du fonctionnement social, professionnel ou tout autre domaine fonctionnel important.

C. L'épisode n'est pas attribuable aux effets physiologiques d'une substance ou à une autre pathologie médicale.

D. Le trouble n'est pas mieux expliqué par un trouble schizo-affectif, une schizophrénie, un trouble schizophréniforme, un trouble délirant, ou un autre trouble du spectre de la schizophrénie et autres troubles psychotiques spécifiés ou non spécifiés.

E. Il n'y a jamais eu d'épisode maniaque ou hypomane. NB : ce critère d'exclusion n'est pas valable si tous les épisodes maniaques ou hypomanes sont induits par une substance ou attribuables aux effets physiologiques d'une autre affection médicale.

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03.04.2020

Spécificateurs pour le sous-type clinique

Avec tension anxieuse

La tension anxieuse est définie par au moins 2 des symptômes suivants présents pendant la majorité des jours du trouble dépressif persistant (dysthymie) :

  1. Sensation d'énervement ou de tension intérieure.
  2. Sensation d'agitation inhabituelle.
  3. Difficulté à se concentrer en raison de l'inquiétude.
  4. Peur que quelque chose de terrible n'arrive.
  5. Impression de perte de contrôle de soi-même. 

Spécifiez la gravité actuelle : 

  • Légère : 2 symptômes.
  • Modérée : 3 symptômes.
  • Modérée à sévère : 4 ou 5 symptômes.
  • Sévère : 4 ou 5 symptômes + une agitation motrice. 

Avec critères de mixité

A. Au moins trois des symptômes maniaques ou hypomaniaques suivants sont présents pendant la majorité des jours du trouble dépressif persistant (dysthymie) :

  1. Humeur élevée, exaltée.
  2. Estime de soi exagérée ou idées de grandeur.
  3. Plus bavard que d'habitude ou envie de parler sans arrêt.
  4. Fuite des idées ou sensations subjectives d'une accélération de la pensée.
  5. Augmentation de l'énergie ou de l'activité orientée vers un but (social, professionnel ou scolaire, sexuel).
  6. Augmentation ou engagement excessif dans des activités qui ont un fort potentiel de conséquences douloureuses (p. ex., achats inconsidérés, écarts de conduite sexuels, investissements déraisonnables).
  7. Réduction des besoins de sommeil (reposé malgré une moindre durée de sommeil par rapport à d'habitude).

B. Les symptômes mixtes sont observables par les autres et représentent un changement par rapport au comportement habituel.

C. Si la personne remplit les critères complets pour la manie ou l'hypomanie, le diagnostic doit être celui de trouble bipolaire I ou II.

D. Les symptômes mixtes ne sont pas imputables aux effets physiologiques d'une substance (p. ex., une substance addictive, un médicament ou autre traitement).

Avec caractéristique mélancolique

A. Un des critères suivants est présent au cours de la période la plus sévère de l'épisode actuel :

  1. Perte de plaisir pour toutes ou presque toutes les activités.
  2. Manque de réactivité aux stimuli habituellement agréables (ne se sent pas bien mieux c.-à-d. < 20-40% de la normale, même temporairement, lorsque quelque chose de bon lui arrive).

B. ≥ 3 des critères suivants :

  1. Une qualité distincte de l'humeur dépressive caractérisée par découragement profond, désespoir, et / ou la morosité ou par un vide de l'humeur.
  2. Il ne s'agit pas que d'une simple Aggravation matinale de la dépression pendant la majorité des jours.
  3. Réveil matinal précoce (c.-à-d., ≥ 2 heures avant le réveil habituel).
  4. Agitation ou ralentissement psychomoteur marqué.
  5. Perte d'appétit significative ou perte de poids (- 5% de masse corporelle).
  6. Culpabilité excessive ou inappropriée. 

Avec caractéristique atypique

La caractéristique atypique s'applique lorsque les critères suivants sont présents pendant la majorité des jours du trouble dépressif majeur :

A. Une réactivité de l'humeur (c.-a-d., l'humeur s'améliore jusqu'à se normalisée en réponse à un évènement réel ou anticipé).

B. ≥ 2 des critères suivants :

  1. Un gain de poids important (+ 5% de masse corporelle) ou une augmentation de l'appétit.
  2. Une Hypersomnie (2h de + que d'habitude ou ≥ 10h de sommeil).
  3. Sensation de membres lourds.
  4. Une sensibilité au rejet dans les relations interpersonnelles ne se limitant pas à l'épisode de troubles de l'humeur ayant un retentissement social ou professionnel important (facteur trait).

C. Critères ne sont pas remplis pour les spécificateurs "avec caractéristiques mélancoliques" ou "avec catatonie" au cours du même épisode.

Avec des caractéristiques psychotiques

Présence d'idées délirantes et / ou d'hallucinations.

Avec caractéristique psychotique congruente à l'humeur : Le contenu de tous les délires et des hallucinations est compatible avec les thèmes dépressifs typiques d'incapacité, de culpabilité, de maladie, de mort, de nihilisme ou de châtiment mérité.

Avec caractéristique psychotique non congruente à l'humeur : Le contenu des idées délirantes ou des hallucinations n'implique pas des thèmes dépressifs typiques d'incapacité, de culpabilité, de maladie, de mort, de nihilisme ou de châtiment mérité, ou le contenu est un mélange des thèmes non congruents et congruents à l'humeur.

Avec caractéristiques catatoniques

Le tableau clinique est dominé par ≥3 des symptômes suivants :

  1. Stupeur (c.à.d. absence d'activité psychomotrice; pas activement lié à l'environnement).
  2. Catalepsie (c.à.d. maintien contre la gravité, de postures imposées par l'examinateur).
  3. Flexibilité cireuse (c.à.d. résistance légère et constante à la mobilisation passive).
  4. Mutisme (c.à.d. absence ou quasi-absence de réponse verbale, exclure si secondaire à une aphasie connue).
  5. Négativisme (c.à.d. opposition ou absence de réponse à des instructions ou à des stimuli extérieurs).
  6. Prise de posture (c.à.d. maintien actif, contre la gravité, d'une posture adoptée spontanément).
  7. Maniérisme (c.à.d., caricature d'actions ordinaires empreinte de bizarrerie, de solennité).
  8. Stéréotypie (c.à.d., mouvements non dirigés vers un but, répétitifs et anormalement fréquents).
  9. Agitation, non influencée par des stimuli externes.
  10. Expression faciale grimaçante.
  11. Écholalie (c.à.d., répétition des paroles d'un autre).
  12. Échopraxie (c.à.d., reproduction des mouvements d'un autre).

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03.04.2020

Spécificateurs d'évolution

Avec début au cours de la grossesse ou du post-partum

S'applique si le trouble dépressif a débuté durant la grossesse ou jusqu'à 4 semaines après l'accouchement.

Avec caractéristique saisonnière

S'applique en cas d'épisodes dépressifs récurrents.

A. Il existe un lien temporel régulier entre de début des épisodes dépressifs majeurs et une période de l'année particulière (p. ex. automne, hiver).
REM : Ne pas inclure les cas où l'effet de saisonnalité est clairement en lien avec un facteur de stress psychosocial (p. ex. période de chômage lors d'un travail saisonnier).
B. Des rémissions complètes surviennent aussi lors d'une période particulière de l'année (p. ex. disparition de la dépression durant le printemps).
C. Sur les 2 dernières années, 2 épisodes dépressifs sont survenus avec ce patron saisonnier et aucun épisode dépressif n'est survenu en dehors de ce patron.
D. A l'échelle de la vie du sujet, les épisodes saisonniers étaient plus nombreux que les épisodes non saisonniers.

Sévérité ou rémission

  • Si en rémission, spécifier si :
    • Rémission partielle : persistance de symptômes de l'épisode dépressif précédent, mais sans que l'état actuel ne remplisse les critères d'un épisode dépressif majeur, ou si la rémission sans symptôme significatif ≤2 mois depuis la fin du dernier épisode.
    • Rémission complète : absence de signes ou de symptômes du trouble à un niveau significatif depuis ≥2 mois.
  • Si présent, spécifier la sévérité : Celle-ci est évaluée sur le nombre de critères cliniques présents, leur sévérité et le niveau de handicape fonctionnel.
    • Léger : Peu ou pas d'autre critères symptomatique en plus de ceux nécessaires pour poser le diagnostic et l'intensité des symptômes est pénible mais gérable et la symptomatologie n'a qu'un impact réduit sur le fonctionnement social ou professionnel.
    • Moyen : Le nombre de symptômes, et/ou leur intensité, et/ou l'impact sur le fonctionnement social ou professionnel se situe entre ce qui est défini pour les qualificatifs "léger" et "sévère".
    • Sévère : Le nombre de critères symptomatiques remplis est substantiellement plus élevé que ce qui serait nécessaire pour poser le diagnostic et l'intensité des symptômes est insupportable et ingérable, et la symptomatologie impacte nettement le fonctionnement social ou professionnel.

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03.04.2020

Changements par rapport au DSM-IVR

aLa traduction française officielle du DSM5 est "trouble dépressif caractérisé". Nous avons préféré conserver l'ancienne traduction plus proche de ce que signifie "major" en anglais : important, significatif. Ce changement n'a été opéré à notre connaissance qu'en France, la critique étant que des formes peu sévères remplissaient les critères de sorte que le terme de majeur était exagéré. Il faut dire qu'il n'y avait pas à l'époque de critères de sévérité. C'est chose faite dans le DSM5.

Critères adaptés pour les enfants et les adolescents :

  • Critère 1. L'humeur peut être irritable.
  • Critère 3. Chez l'enfant, il faut apprécier l'absence d'une prise de poids normale.

Disparition des dépressions chroniques comme spécification. Elles deviennent un trouble à part entière (cf. trouble dépressif persistant), mais en les fusionnant avec la dysthymie.

Apparition d'une dépression mixte, possible de façon isolée du trouble bipolaire (avant une mixité signait un trouble bipolaire). Les critères sont très difficiles à remplir puisqu'ils exigent une quasi superposition d'une symptomatologie dépressive et maniaque. La définition de cette entité et sa place vont à l'encontre des courants en faveur d'une "bipolarisation" de cette entité. On est loin de la définition première d'un épisode dépressif chez un patient souffrant de PMD comme l'avait défini Leonhard (cf. PMD).

Enfin il est laissé à l'appréciation du médecin d'inclure ou non comme épisode dépressif majeur une réaction de deuil lors de la perte d'un proche, ruine financière, réaction à une catastrophe naturelle ou a une affection médicale. Il est nécessaire de prendre en compte la culture du sujet. Les éléments à prendre en compte en faveur d'une réaction dépressive :

  • Evolution ± continue sur une durée prolongée (il était en règle générale demandé à ce qu'il y ait une période d'au moins 2 mois avant de parler de "deuil compliqué" et d'EDM dans les versions précédentes. Mais comme le deuil peut durer jusqu'à 1 à 2 ans, ce critère temporel est laissé à l'appréciation du médecin).
  • Prédominance de l'humeur dépressive.
  • Incapacité à anticiper ou à prendre du plaisir.
  • Ruminations pessimistes pas en lien avec la perte.
  • La personne se fait des reproches, sentiment d'indignité, d'inutilité.
  • Pensée ou idéation suicidaire sans lien avec le défunt (p. ex. pour échapper à la douleur, parce qu'il ne se sent pas le droit de vivre)

Les éléments à prendre en compte en faveur d'un deuil normal :

  • Evolution par vagues décroissantes en quelques jours ou quelques semaines.
  • Prédominance du sentiment de vide et de perte
  • Persistance d'émotions positives et d'humour.
  • Pensées et souvenirs tournant autour de la personne ou de l'objet qui a disparu.
  • Préservation de l'estime de soi. La présence d'idées d'indignité se cantonne généralement à un sentiment de manquement vis à vis du défunt (p. ex. de ne pas être venu le voir assez souvent).
  • S'il y a des pensées autour de la mort ou des pensées suicidaires, c'est en lien avec le défunt, pour le rejoindre par exemple.

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