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< L'intelligence artificielle
25.03.2018 15:37 Il y a : 7 yrs
Catégorie : Recherche, General, Internal, Lecture, Neuro-crypto, Formation
Auteur : Jack R Foucher

Vers la fin de "LA" schizophrénie ?

Catatonie périodique et cataphasie, le premier pas vers l’identification de véritables maladies


Ce qu’il est convenu d’appeler « la » schizophrénie rassemble sous un même nom des présentations cliniques très hétérogènes, dont l’évolution et la charge héréditaire sont aussi extrêmement variables. De fait, Emil Kraepplin, l’inventeur du concept, a passé la seconde moitié de sa vie à tenter d’en identifier des entités plus homogènes et Eugène Bleuler, l’inventeur du nom, parlait du groupe « des » schizophrénies. Le DSM et la CIM on pendant un temps fait taire la critique, mais l’échec à en identifier la ou les causes et donc d’en faire une véritables « maladie » a relancé le débat avec le tournant du siècle : la schizophrénie peut-elle se définir par une cause ? Ou n’est-elle qu’une simple convention rassemblant sous un même label des maladies psychotiques ayant chacune leur propre cause ?

Une étude réalisée par le cercle d’excellence sur les psychoses apporte une réponse sans ambiguïté à cette question. Nos membres ont conjugué leurs efforts pour comparer deux groupes de patients répondant à la description de « la schizophrénie », mais identifiés de longue date comme des entités potentiellement différentes (cf. classification de Wernicke-Kleist-Leonhard). Ces entités répondent aux noms barbares de catatonie périodique et de cataphasie. Le préfixe « cata » suggère l’altération d’un processus, soit psychomoteur pour la cata-tonie, soit verbal pour la cata-phasie. On parle à leur sujet de « phénotype », pour signifier que le diagnostic reste stable dans le temps et qu’il est homogène au sein d’une même famille, c’est-à-dire que si deux membres ou plus de la même famille souffrent d’un trouble psychotique, il s’agit de la même forme. Cela parait logique mais ce n’est pas le cas pour les « troubles » définis par les classifications internationales comme la CIM ou le DSM.

Pour rechercher la cause, nos membres ont cartographiés le fonctionnement de l’ensemble du cerveau en utilisant une méthode quantitative par IRM. Si on suppose que des anomalies du fonctionnement cérébral sont bien à l’origine de la symptomatologie, la question revient à savoir si comparées à des sujets sains, ces anomalies sont communes à la cataphasie et à la catatonie périodique ou si elles leurs sont spécifiques. Dans le dernier cas, cela signifie que les anomalies ne sont pas seulement observées entre des patients catatoniques et des sujet sains, mais il faut aussi qu’elles permettent de différencier les catatoniques des cataphasiques et inversement. De plus, pour être crédibles, ces anomalies devraient être situées dans les régions susceptibles de sous-tendre le processus altéré : des régions impliquées dans la motricité pour la cataphasie périodique et des régions impliquées dans le langage pour la cataphasie.

Les résultats sont sans équivoques : bien que tous les patients soient considérés comme souffrant de « la » schizophrénie, les deux phénotypes n’ont aucune anomalie en commun, en dehors de celle en rapport avec la prise d’un traitement antipsychotique. En revanche, catatonie périodique et cataphasie présentent des anomalies spécifiques et localisées dans des régions pouvant expliquer leurs caractéristiques propres. Une augmentation de l’activité des régions prémotrices gauche (en rouge) différencie la catatonie périodique non seulement des témoins mais aussi de la cataphasie. Et inversement c’est une diminution de l’activité dans les régions temporales dédiées au langage (en bleu) qui différencie la cataphasie, non seulement des sujets sains, mais aussi des patients souffrant d’une catatonie périodique.

Il faut rester prudents, mais nos membres explorent déjà la possibilité que ces anomalies soient de potentiels tests diagnostiques et que leur correction puisse soigner les patients. Car cette approche différenciée va de pair avec un complet bouleversement de la recherche sur des causes et leur traitement, ce que les épistémologues appellent une révolution paradigmatique. Un immense chantier semble s’ouvrir, porteur d’un formidable espoir !

Vidéo de présentation en anglais (6 min), version longue (31 min, pdf)

Foucher JR, Zhang YF, Roser MM, Lamy J, De Sousa PL, Weibel S, Vidailhet P, Mainberger O, Berna F. (in press) A Double Dissociation Between Two Psychotic Phenotypes: Periodic Catatonia and Cataphasia. Progress in Neuropsychopharmacology and Biological Psychiatry (article, supplement1, supplement2) (doi).

Actualité INSERM 29/03/2018 (lien)


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