Cas
clinique : Mr Jaquim
Commentaires Jack Foucher
Diagnostic CIM-10
Diagnostic DSM4R
Diagnostic WKL
Diagnostic CIM-10
L'épisode de 2002 correspond
à un épisode dépressif léger (F32.0) sur
les éléments cliniques dont nous disposons (doivent avoir
persisté ≥ 2 semaines) : au moins 2 symptômes typiques
(tristesse et diminution de l'énergie avec amimie et
réduction de l'activité), et au moins 2 symptômes
autres (pessimisme et idées suicidaires). Le nombre de
symptôme somatique rapporté est insuffisant pour remplir
les critères diagnostics, donc : épisode dépressif
léger sans syndrome somatique (F32.00).
Pour le second épisode de 2005, il n'y a pas suffisamment de
symptômes maniaques rapportés pour en faire une manie
délirante : seul l'exaltation et l'irritabilité sont
mentionnées. On ne parle pas d'augmentation de l'énergie
et d'au moins 2 symptômes autres. En revanche, en plus d'une
exaltation et de l'irritabilité il y a de façon
concourante, des idées délirantes persistantes ce qui
permet d'établir le diagnostic de trouble schizo-affectif, type
maniaque (F25.0).
La clinique n'est pas assez détaillée pour
l'épisode dépressif qui suit, ce qui exclue aussi le
diagnostic de trouble schizo-affectif. Cet épisode ne
répond pas non plus au critère de dépression
post-schizophrénique (il aurait fallu remplir les
critères de schizophrénie sur les 12 mois
précédents). Le diagnostic est alors celui
d'épisode dépressif, sans précision (F32.9).
Enfin le dernier épisode pourrait initialement correspondre
à celui de manie avec symptômes psychotiques (F30.2) : au
moins les deux symptômes typiques (élévation de
l'humeur, augmentation de l'énergie), et au moins deux
symptômes autres (optimisme et familiarité),
associé à des idées délirantes congruentes
à l'humeur (mégalomaniaques et
d'invulnérabilité). Cependant l'antécédence
et a persistance pendant un temps significatif (à
l'appréciation de l'évaluateur) des symptômes
psychotiques doit orienter vers un trouble schizo-affectif, type
maniaque (F25.0).
Si on s'arrête à l'idée d'un trouble schizo-affectif maniaque(CIM-10),
c.-à-d. bipolaire (DSM). Le pronostic est
considéré comme meilleur que celui de la
schizophrénie, mais significativement moins bon que pour le
trouble bipolaire. Le trouble schizo-affectif dépressif
est de moins bon pronostic que la forme maniaque d'où leur
séparation.
Il affecte plus volontiers les femmes que les
hommes. Les patients présentent de très fréquente
fluctuations diagnostiques, puisque les prochains épisodes
peuvent être schizophréniques, ou thymiques. Le pronostic
fonctionnel est considéré comme mauvais pour ce qui est
du travail, très mauvais pour ce qui est fonctionnement social.
Pour le traitement, cf. recommandations.
Diagnostic DSM4R
Le diagnostic de
dépression se fait sur la présence d'une humeur
dépressive (symptôme obligatoire), mais il aurait fallu au
moins 4 autres symptômes. Or nous n'en avons que 3 : diminution
de l'énergie, idées suicidaires et trouble du sommeil. Le
pessimisme n'en fait pas partie à l'inverse de la CIM-10. Aussi
sur les seuls éléments dont nous disposons, le diagnostic
de trouble dépressif majeur (il faut comprendre
avéré, "majeur" n'a aucune connotation de gravité)
ne peut être porté selon le DSM-4R. On se rabat alors sur
celui de trouble dépressif non spécifié (F32.9)
dès lors qu'aucune prise de toxique ne peut être
incriminée.
Pour l'épisode de 2005, là encore, le niveau d'exigence
du DSM-4R ne permet pas d'établir un diagnostic similaire
à la CIM-10. En effet, pour le diagnostic d'épisode
schizo-affectif type maniaque, il faut remplir les critères d'un
épisode maniaque en plus des critères de rang A de
schizophrénie. Or le diagnostic de manie n'est pas possible sur
les éléments dont nous disposons : en plus de
l'irritabilité / exaltation, il n'y a que le critère
augmentation de l'estime de soi qui soit rempli, il en faudrait au
moins 2 autres (3 s'il n'y avait eut que l'irritabilité). De
même, seules les idées délirantes sont
présentes, mais n'étant pas bizarres il faudrait un autre
symptômes. Or il n'y a pas de symptômes négatifs,
pas d'hallucinations, et l'hermétisme n'est pas
considéré comme une trouble du cours de la pensée.
On pourrait porter le diagnostic de trouble délirant de type
mixte devant la présence d'idées délirantes non
bizarres de plusieurs types (F22.0). Mais on pourrait aussi
décréter que le fait qu'un symptôme ne soit pas
signalé ne signifie pas que ce symptôme n'était pas
présent et on utilise le diagnostic de trouble psychotique non
spécifié en raison de cette incertitude (F29).
Il n'y a pas suffisamment d'élément pour porter un
diagnostic DSM pour l'épisode dépressif (donc non
spécifié – F32.9).
Pour le dernier épisode, les critères d'un épisode
maniaque sont cette fois-ci remplis : exaltation de l'humeur
(critère A) et au moins 3 autres signes : idées de
grandeur, agitation psychomotrice, et on peu supposé sur le
descriptif qu'il y avait une plus grande tendance à parler. Pour
parler d'épisode schizo-affectif, il faut que les
symptômes psychotiques durent au moins plus d'un mois et se
poursuivent plus de 2 semaines en l'absence de trouble de l'humeur
significatif. Il semble que cela soit le cas, même si les
délais ne sont pas précisés. Le sous type est
bipolaire, ce qui correspond au sous-type maniaque de la CIM-10 (F25.0).
Diagnostic WKL
La classification de WKL a
conservé le diagnostic de dépression
réactionnelle, autrement dit d'origine exogène
(liée aux évènements de vie). Le premier
épisode en 2002, alors qu'il était âgé de 38
ans aurait pu en faire partie, puisqu'on nous dit que le patient venait
de traversé un événement de vie que l'on peut
considérer comme pénible. Mais on a déjà de
nombreux symptômes plus spécifique du trouble qui se
précisera ultérieurement : sténicité,
attitude méfiante, froideur affective, regard fuyant. Ces
derniers étaient suffisamment marqués pour qu'un
traitement par antipsychotiques ait été initié,
mais malheureusement pas poursuivit.
Juste sur ces éléments on peut suggérer soit une
forme unipolaire, la dépression soupçonneuse, ou alors
des formes bipolaires : la PMD est peu probable si le tableau est
stable, une psychose anxieuse (psychose cycloïde) est possible,
mais surtout, une paraphrénie affective.
Il est classique d'observer un épisode dépressif dans la
phase initiale d'une paraphrénie affective. De tels
épisode deviennent en revanche exceptionnelles par la suite et
essentiellement remplacés par des formes anxieuses. S'il est
parfois difficile d'être certain du diagnostic dès cet
épisode, il faut néanmoins évoquer cette
possibilité face à une réticence méfiante
comme il a pu la manifester, et rechercher des symptômes plus
typiques : anxiétés, première idées
délirantes de préjudices ou de persécution sous
tendu par un affect vif etc... C'est sans doute ce qui pointait
déjà lorsqu'il "exprime son sentiment d’être
victime des malheurs qui l’assaillent".
La phase suivante élimine les diagnostics unipolaires. La PMD et
la psychose d'anxiété félicité sont rendues
peu probable en raison du type d'idée délirantes :
référence, persécution, mégalomaniaque, se
voit en rédempteur de la société,
érotomanie. Les thèmes mystiques sont aspécifiques
en tant que tel, c'est la façon dont ils sont traité qui
va distinguer une psychose
d'anxiété-félicité d'une paraphrénie
affective : autant le patient est empathique dans la première,
autant il est égoïste dans la seconde (une
caractéristique qui vaut qu'elle que soit le type). Enfin, on
retrouve les éléments qui dans cette phase d'exaltation,
et d'irritabilité deviennent encore plus caractéristiques
: la réticence méfiante, menant à des propos
allusifs au point de rendre le discours hermétique sans qu'il
soit possible de parler d'un trouble du cours de la pensée. Il a
le recule suffisant pour se rendre compte qu'on pourrait le prendre
pour un fou, mais il est trop pris dedans affectivement pour mettre en
doute la véracité de ses idées. Enfin la
persistance de ces éléments après l'épisode
signe sans doute un début 'accumulation de symptômes
résiduels.
Les phases qui suivent ne font qu'appuyer un peu plus le diagnostic.
Le début tardif du trouble est classique puisque les patients
rentrent en contact avec la psychiatrie autour de 35 ans en moyenne. Le
trouble est plus fréquent et plus sévère chez la
femme (1 homme pour 3 femme) .
La proportion de frères et soeur souffrant de psychose est de
l'ordre de 15% (non corrigé pour l'effet de l'age),
majoritairement d'un trouble homotypique (c.-à-d. aussi d'une
paraphrénie affective). En revanche le nombre de parent atteint
est faible (autour de 3%). Cet écart entre fratrie et parent en
plus de l'effet de consanguinité laisse supposé que
l'hérédité est de type récessive (à
pénétrance incomplète).
L'évolution est plutôt bonne sur le plan de la
capacité de travail, longtemps préservée. En
revanche le fonctionnement social est généralement
très détérioré : ce sont des gens qui
resterons seul et aurons un tissus social extrêmement
limité. A terme cependant peuvent apparaître d'autres
symptômes (hallucinations, idées délirantes
fantastiques alors que s'installe un trouble de la pensée a
minima). Il n'y a en règle pas d'aplatissement des affects et
c'est la coloration affective très vive observée
même lors d'une forme avancée qui différencie ce
tableau d'une paraphrénie fantastique. A noter que pour une
fois, l'évolution est d'autant plus favorable (moindre
accumulation de symptômes) que le patient est de sexe masculin.
Le traitement par neuroleptique est incontournable et peut être
avantageusement assorti d'un normothymique qui en majore les effets
même sur les troubles psychotiques (~70% d'amélioration
modérée à majeure en add-on d'un
neuroleptique).
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à jour juillet 2008,
Jack Foucher